le 25/02/2022
-Les Français entretiennent un rapport ambigu avec les droits de succession, sans doute en raison d’un manque de connaissance du sujet. 80% d’entre eux s’estiment favorables à une baisse des droits de successions, selon un sondage OpinionWay-Square pour Les Echos et Radio classique, en janvier 2022, tout en ignorant qu’une très grande proportion des successions (estimée à 75%) n’est pas taxée, la valeur des biens transmis se situant sous le seuil des abattements personnels. S’ils admettent le principe d’une taxation de l’héritage, ils veulent transmettre à leurs enfants sans frottement fiscal. Bref, les droits de successions sont en France impopulaires.
De nombreuses remises en question
Depuis un an, plusieurs rapports se succèdent autour de la question de l’héritage en France. En juin 2021, la rapport dit Blanchard Tirole, commandé par le Président de la République sur les Grands défis économiques, puis en octobre 2021, le rapport de l’OCDE sur l’impôt sur les successions, et enfin, en décembre 2021, le rapport du Conseil d’analyse économique chargé de conseiller Matignon : tous recommandent de réformer en profondeur l’impôt sur les successions. Ils partent du constat que l’inégalité des chances s’accroit. 60% du patrimoine actuel d’un Français provient de l’héritage, contre 35% au début des années 1970.
Bien que le barème affiché des droits de successions soit très élevé en France, ils pointent du doigt les mécanismes d’exonérations, et techniques de planification successorale, telles que l’assurance-vie, le démembrement de propriété ou encore le Pacte Dutreil pour la transmission d’entreprises.
Manque de statistiques
Depuis, des voix se sont élevées pour dénoncer l’absence de données fiables sur lesquelles les différents rapports se fondent et une approche idéologique de ces analyses. La question des pactes Dutreil – qui permettent l’exonération des donations et successions d’entreprise à hauteur de 75% – est au cœur d’une des sujets. Le 27 janvier dernier, les représentants des chefs d’entreprises et leurs conseils ont fait valoir devant une délégation sénatoriale que malgré l’exonération partielle, les transmissions d’entreprises sont davantage taxées en France qu’à l’étranger. Ils sont unanimes à déclarer que ces transmissions restent trop couteuses et demeurent un frein à la transmission, et donc au maintien des PME et ETI dans les territoires. Son coût (500 millions d’euros de dépenses fiscales) doit être mis en balance avec les enjeux économiques du tissu productif français.
Le débat pourrait se poursuivre dans l’avenir. En effet, le Conseil des prélèvements obligatoires, une institution associée à la Cour des comptes, dans un rapport du 9 février 2022, invite Bercy à fournir des données fiscales sur l’imposition du patrimoine et de l’imposition des successions. Le Conseil d’analyse économique a également recommandé d’harmoniser la collecte des données sur les donations et les successions. C’est à ces seules conditions qu’un débat serein pourrait avoir lieu.